La prophétie avait prédit que le garçon naîtrait le troisième jour du troisième mois de l'année 3033. Il ramènerait la stabilité dans le royaume de Eurasia, au bord du chaos depuis la 5e guerre interplanétaire contre les martiens. Une guerre chimique particulièrement dévastatrice grâce à un poison ciblant uniquement le chromosome Y des êtres humains. Les trois quart des hommes avait été décimés. Mais la prophétie n'était pas tout à fait exact puisque l'enfant est né le lendemain...
Chapitre 1 : Scolarité
Yumi, 18 ans. Ça y est, c'est le grand jour. La rentrée scolaire... J'ai hâte de retrouver Izuka et Sakura. Je me regarde dans la glace : j'ai une petite poitrine, un 90B à tout casser. Je remonte mes seins pour paraître plus féminine mais rien n'y fait. Je soupire, dépitée. J'enfile une dernière fois mon uniforme réglementaire. Sakura va faire sa crâneuse avec son 95D. Je pense à ma mère, à ma tante. Elles m'ont parlé de leur première fois, quand elles se sont déshabillées pour la dernière fois, de leur stress ressenti devant les camarades... Mais selon elles, ce que je ne dois pas oublier, c'est que l'on est toutes égales face à cette épreuve. Je me suis souvent demandée ce que donnerait un monde ou la femme serait l'égale de l'homme, où elle ne serait pas obligée de vivre nue. Comment arriverait-elle à prendre sa place ? On nous a appris que la pudeur est un concept dépassé, d'un autre temps : toujours regarder droit devant, jamais en arrière. D'après mademoiselle Yin, la pudeur est un frein à notre bien-être. Celui-ci passe par la libération du corps et de l'esprit.
Dans le salon, ma mère s'impatiente, elle demande si je suis prête. Je prends une grande respiration et la rejoints. Ma tante se tient à côté d'elle. Elles affichent une aisance décomplexée : le buste droit, la poitrine gonflée fait ressortir leurs seins de femmes sereines et confiantes. Leur pubis à une bonne pilosité, tout comme moi. Leur nudité est naturelle. Ma petite sœur Kumi se tient sur le palier. Elle envie ma situation : c'est le grand jour, le jour où je vais devenir Femme. Nous apprenons dès le CP tout ce qu'il faut savoir pour devenir adulte. Nous savons toutes quel sacrifice il faudra faire et nous l'acceptons : il ne peux en être autrement, nos mère sont passées par
là, nos grand-mères et des générations avant elles. Je ne peux pas trahir leur mémoire en rejetant cette tradition. Pourtant, à quelques heures de cet événement, l'angoisse m'envahit. Et si mes règles se déréglaient ? Si mon tampon n'était soudain plus efficace ? Et si on se moquait de moi ? Si on me rejetait parce que je ne rentrais pas dans les critères ? Kumi est encore jeune, elle ne comprends pas encore que la transformation de son corps ne se fait pas sans douleur. Mes premières règles furent pour moi un vrai traumatisme. Je m'en souviens comme si c'était hier. J'étais en classe. La professeure m'avait appelée au tableau pour réciter ma poésie. Mais dès que j'ai prononcé le premier mot, du sang à souillée ma culotte. J'avais ma mini-jupe réglementaire. Malheureusement, le liquide s'est écoulé le long de ma jambe. Morte de honte, je me suis enfuie dans les toilettes. Des larmes me viennent au bord des yeux rien qu'en me rappelant ce souvenir.
Ma mère m'ouvre la porte. Non calme-toi !! Ce genre d'accident ne s'est jamais produit depuis que j'ai mes règles. Allez je ne peux plus faire marche arrière ! Arrivée sur le palier, je mets d'instinct ma main sur mon sexe. Ma mère ouvre la porte et et je m'y engouffre. Ma tante monte à l'arrière, me laissant le privilège de monter pour la première fois devant. Un frisson me saisit lorsque je vois Thiam, mon ami d'enfance, traverser la rue en vélo. Il porte l'uniforme traditionnel de tous les étudiants mâles : chemise noire à manches longues et pantalon à velours noir. Il me fait un signe amical de la main et je lui rends un sourire timide : la prochaine fois qu'il me verra je serai nue. J'ai un nœud à l'estomac.
Dans la cour, une centaine de jeunes femmes se sont éparpillées un peu partout. Certaines se sont regroupées en bandes et se racontent leurs vacances, leurs histoires de cœurs. D'autres, au contraire, se sont isolées dans un recoin du bâtiment. Il va falloir je trouve ma place : l'angoisse me saisit les tripes. J'entends alors la voix de Sakura dans mon dos. À peine me suis-je retournée qu'elle me sert dans ses bras. Sa poitrine généreuse contre mon corps. Je suis troublée mais pas le temps de rêvasser. La sonnerie de rassemblement retentit soudain. Une femme d'une cinquantaine d'années apparaît sur le perron. Nue, un chignon parfaitement noué, des lunettes à montures rectangulaire vissées au bout du nez, des escarpins noirs. La directrice. Madame Wong.
Elle fusille les élèves du regard pour obtenir le silence, une baguette de bambou dans la main droite. Les filles, obéissantes, se mettent en rang, têtes baissées en signe de respect. Je jette un bref regard à ma mère : elle me sourit et m'adresse un signe de tête pour m'encourager, puis se dirige vers l'estrade réservée aux familles. Sakura se tient à mes côtés, parfaitement droite. J'admire son assurance. Sa main se rapproche imperceptiblement de la mienne et son auriculaire enlace le mien. Tout va bien se passer. Madame Wong abaisse sa baguette : c'est le signal. Nous nous déshabillons toutes d'un même mouvement rapide. Enfin presque. Certaines élèves stressées, hésitantes, prennent tout leur temps. Une fois nues, nous nous tournons vers nos mère et nos tantes. Celles-ci se sont levées et nous applaudissent : le rite de passage s'est terminé sans problème. Je vois alors ma mère qui a les larmes aux yeux. Je l'ai enfin rendue fière ! Je me détends un peu. Une vingtaine de femmes nues, casquettes et baskets grises, rassemblent nos uniformes en un énorme tas au milieu de la cour avant d'y mettre le feu. Notre jeunesse fait dorénavant partie du passé. Une mélancolie amère me submerge soudainement. Une larme menace de s'écouler et je passerais pour une pleurnicharde le restant de ma scolarité. Heureusement nous nous mettons en rang par deux et Madame Wong nous demande d'avancer. Nous nous arrêtons dans le hall où nous attendent dix femmes. Elles portent toutes une cravate sur leur corps nu. Nos professeurs. Nous sommes réparties dans les classes et je retrouve Sakura. Mon stress diminue un peu. Notre professeure principale et Mademoiselle Miu. Elle s'incline pour nous accueillir et nous invite à entrer dans la classe. Elle à l'air gentille. Notre planning est chargé :
Lundi matin, 8h : Cours d'éducation sexuelle. Comprendre le fonctionnement de l'anatomie féminin et masculin ;
10h : La nudité et la relation avec la caste des mâles. Qui sont-ils ? Comment se comporter en leur présence ?
Mardi matin, 8h : Plaisir sexuel. Comment allier nudité et plaisir ? Quels sont les pratiques et objets sexuels acceptés ?
10h : Histoire de la nudité ;
Mercredi matin, 8h : Monde du travail et nudité ;
11h, plaisir anal (cours en option) : L'anus, une zone érogène entre dégoût et plaisir. Comment maîtriser son plaisir anal ?
Jeudi matin, 8h : Nudité et civisme. Comportements et pratiques sexuelles, Service civique obligatoire ;
Vendredi matin, 8h : Mathématiques ;
10h : Géopolitique d'Eurasia.
Les après-midi sont réservés aux activités sportives collectives : Football, basketball, volley-ball...
Des partiels sont organisés tous les trimestres. Mademoiselle Miu est notre référente pour tout ce qui concerne l'organisation de l'année scolaire et du fonctionnement de l'établissement. Une psychologue est à notre disposition pour tout élève qui ne sent pas bien dans sa nudité. Mademoiselle Miu fait ensuite l'appel et chaque élève se lève à l'annonce de son nom. Un chuchotement admiratif monte lorsque Sakura se met debout et présente son 95D, tandis que quelques ricanements sont étouffés quand Izuka dévoile à la classe une poitrine plate en se levant : les filles sont parfois impitoyables entre elles. Mais la sonnerie retentit soudain, sauvée par le gong ! Les filles du premier rang se précipitent dans le couloir en courant. Ma mère m'a dit que Madame Wong est intraitable sur le respect et la discipline : les punitions seraient des coups de baguette sur les fesses.
Dans la cour, un petit groupe se forme autour de Sakura et moi. Je suis impressionnée par la métamorphose de mon amie. Elle est plus mature. L'été lui a été bénéfique. Elle semble prendre un statut de leader bienveillant et naturel parmi toutes les filles de la classe. Elle discute et plaisante, les camarades ont l'air plus à l'aise et rigolent. Notre nudité fait dorénavant partie de notre être, c'est notre identité.
La rentrée s'est plutôt bien passée, maintenant rentrons chez nous pour commencer une nouvelle vie.